Le Rapporteur spécial de l’ONU sur les droits à la liberté d’association et de réunion vient de clouer au piloris le régime algérien dans un rapport au vitriol.
Au terme d’une inspection inédite dans le pays, il pointe un décalage abyssal entre les libertés publiques promises dans la Constitution et la réalité du terrain, où la société civile demeure étranglée. Un constat implacable qui place l’Algérie dos au mur de ses dérives autoritaires.
13 pages. C’est la longueur du réquisitoire impitoyable rendu par le Rapporteur onusien Clément Voule après sa rare visite de 10 jours en Algérie. Dès l’introduction, le ton est donné : « Un climat de peur règne dans le pays », assène l’expert, pour qui les autorités usent de « lois obsolètes » datant de l’ère Bouteflika afin de « restreindre arbitrairement les libertés fondamentales ».
Pourtant, rappelle M. Voule, la nouvelle Constitution de 2020 était censée acter une rupture démocratique en garantissant noir sur blanc les droits d’association, de réunion et d’expression. Las, le Rapporteur dénonce un écart béant entre les principes édictés et leur application concrète.
Premier sujet d’inquiétude : la répression judiciaire incessante contre les militants du Hirak. Pas moins de 200 d’entre eux croupiraient encore en prison sur la base de vieilles lois liberticides. Autre point noir : la dissolution de plusieurs grandes organisations de défense des droits humains comme le RAJ ou la LADDH, jugées trop critiques.
Même traitement pour les syndicats autonomes et les partis d’opposition, qui se voient entravés dans leur enregistrement officiel par des barrières bureaucratiques. Idem pour le droit de manifester, toujours soumis dans les textes au régime d’autorisation préalable, en contradiction flagrante avec la Constitution.
Mais le Rapporteur réserve ses critiques les plus virulentes à l’interdiction faite aux associations de recevoir le moindre financement étranger. Cette disposition « disproportionnée » sert en réalité à museler les voix discordantes sous couvert de lutte contre le terrorisme, dénonce l’expert onusien.
Bref, à l’arrivée, le constat est impitoyable : en dépit de sa nouvelle Constitution, l’Algérie piétine dans son processus démocratique, étranglée par un carcan législatif désuet. Pire, les 3 ans écoulés depuis 2020 ne sont déjà «pas raisonnables» aux yeux de M. Voule pour réformer ces lois liberticides.
Face à ce réquisitoire cinglant, la pression monte sur le régime algérien. L’ONU l’enjoint sans détour à libéraliser son arsenal juridique afin de respecter ses engagements nationaux et internationaux. L’urgence ? Rebâtir la confiance avec sa société civile et concrétiser les espoirs de changement du Hirak. Faute de quoi, l’Algérie restera prisonnière de ses démons autoritaires, au détriment de son image.
Hassan G.