KOUKOU Editions exclu du Salon du livre amaziɣ d’At Wasif
Le commissaire du Salon du livre amaziɣ d’At Wasif vient de nous notifier, par courrier électronique, l’exclusion de KOUKOU Editions de cette manifestation prévue du 30 avril au 3 mai. Selon des sources proches de la Wilaya de Tizi Ouzou, l’ordonnateur de cette fatwa est, une fois encore, M. Tidjani Tama, président de la Commission de censure du ministère de la Culture et des Arts, qui avait déjà exclu KOUKOU Editions du SILA et des salons régionaux de Bougie et de Tizi Ouzou. Notre plainte pour ‘’attentat contre les libertés, abus et usurpation de fonction’’ contre le fonctionnaire-militant qui avait autorisé, en 2023, les éructations de Hitler, de Mussolini et d’Eric Zemmour, est en cours d’instruction devant le Tribunal correctionnel de Hussein Dey.
Cette nouvelle agression contre une maison d’édition qui active dans la légalité, et dont les publications sont disponibles dans les plus grandes librairies du pays, revêt cette fois une symbolique bien particulière. Elle intervient quelques jours après le 45e anniversaire d’un Printemps berbère confisqué, réduisant le message de luttes et d’espoirs de ce sursaut de dignité à son expression folklorique.
Victimes collatérales de l’arbitraire qui a ciblé leur éditeur, des intellectuels de renom qui ont consacré leur vie à la promotion de la langue et de la culture amaziɣes, viennent d’être bannis d’un salon du livre dédié à l’amaziɣité : Tassadit Yacine – Salem Chaker – Mouloud Feraoun – Mouloud Mammeri – Nabile Farès – Farida Aït Ferroukh – Hadjira Oubachir – Ahmed Aït Bachir – Aomar Oulamara … Parmi eux, l’historien et militant du mouvement national Mohamed Harbi, qui a décidé, en octobre 2024, de prendre sa retraite politique, à l’âge de 90 ans, en envoyant un message fort à ses compatriotes : la traduction de ses mémoires en tamaziɣt.
Après l’interdiction du Festival Racont’Arts, du Salons du livre de Boudjima, des Cafés littéraires de Bougie et de Bouzeguène, des ventes-dédicaces dans les librairies, et de toute expression citoyenne non contrôlée, le Salon du livre amaziɣ d’At Wasif reste le dernier espace du libre-débat encore toléré dans la région. Pour déjouer les manœuvres des manipulateurs de l’ombre qui poussent au pourrissement, ce rescapé du culturicide programmé doit être protégé. Il faut soutenir ses organisateurs bénévoles, qui ont réalisé un travail remarquable malgré un environnement hostile et d’intolérables pressions. Il faut encourager les auteurs et les éditeurs présents à ce salon par l’acquisition de leurs livres. Malgré la chappe de plomb autoritaire qui a paralysé le pays, il faut participer aux conférences-débats pour dénoncer les provocations récurrentes qui, au nom d’une ‘’unité nationale’’ frelatée, ont soumis la Kabylie à un état d’urgence de fait accompli.
Dans la croisade lancée par les miliciens de la pensée pour promouvoir une idéologie sectaire, intolérante et rétrograde, KOUKOU Editions continuera d’opposer la force du droit, et d’assumer avec détermination une ligne éditoriale autonome et ouverte sur la société.
Alger, le 30 avril 2025
Directeur de KOUKOU Editions
R.I.