Algérie : le défenseur des droits humains Abdallah Benaoum condamné à 18 mois de prison ferme
Relizane (Algérie) – Le défenseur des droits humains Abdallah Benaoum a été condamné le 30 avril 2025 par le tribunal correctionnel d’Oued Rhiou, dans la wilaya de Relizane, à une peine de 18 mois de prison ferme, assortie d’une amende de 200.000 dinars algériens (environ 1.513 USD) et de la privation de ses droits civils et politiques pour cinq ans.
Cette condamnation a suscité une vive inquiétude au niveau international. Dans une communication officielle, le Rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des défenseurs des droits humains a alerté sur de graves atteintes aux droits fondamentaux, évoquant notamment l’arrestation sans mandat, le recours à la force lors de l’interpellation et l’absence de garanties d’un procès équitable.
Arrestations sans mandat et usage de la force
Le militant avait été arrêté une première fois le 28 août 2024 devant son domicile à Relizane par les services de sécurité intérieure. Selon des informations relayées au Rapporteur spécial, les agents auraient fait usage de la force, avant de saisir les téléphones et appareils électroniques de sa famille lors d’une perquisition. Transféré à Oran, il avait été interrogé au sujet de ses publications critiques sur l’élection présidentielle prévue le 7 octobre 2024.
Le 1er septembre 2024, il avait été condamné à un an de prison ferme et à une amende, mais sans placement immédiat en détention.
Un parcours marqué par la répression
Reconnu pour son engagement en faveur des droits du travail, des prisonniers et des personnes handicapées, Abdallah Benaoum a également documenté l’usage excessif de la force policière contre les manifestants. Ses activités militantes l’ont déjà placé au cœur de plusieurs communications des mécanismes onusiens (2013, 2016, 2021) dénonçant la répression des voix critiques en Algérie.
En décembre 2024, il avait déclaré avoir subi des pressions qu’il qualifiait d’« extorsion », affirmant avoir été contraint de garder le silence sous la menace de représailles visant un membre de sa famille.
Un procès contesté
Le 30 avril 2025, le tribunal l’a reconnu coupable de « diffusion de fausses informations susceptibles de porter atteinte à la sécurité et à l’ordre publics » (article 196 bis du Code pénal), de « publication de contenus préjudiciables à l’intérêt national » (article 96) et « d’outrage à un corps constitué » (article 146).
Ses avocats dénoncent un procès précipité, estimant qu’il viole ses droits à la défense et constitue une atteinte manifeste à sa liberté d’expression. L’affaire est actuellement en appel, avec une audience prévue le 13 juillet 2025.
Les préoccupations des Nations unies
Dans sa communication, le Rapporteur spécial souligne que les poursuites engagées contre Abdallah Benaoum semblent constituer des représailles pour ses activités légitimes de défense des droits humains, et alerte sur l’utilisation récurrente de dispositions du Code pénal à portée large et imprécise.
L’expert onusien rappelle que l’Algérie, État partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), s’est engagée à garantir la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et le droit à un procès équitable.
Une affaire suivie de près
Cette affaire est devenue emblématique des pressions exercées sur les défenseurs des droits humains en Algérie. La communauté internationale et les mécanismes onusiens continueront de suivre de près l’évolution du dossier d’Abdallah Benaoum, en particulier son appel prévu en juillet.