L’on apprend que le directeur de koukou Editions a décidé de saisir la justice contre ce qu’il a qualifié de « forfaiture » et d’ « abus de fonction » et d’ « usurpation de la fonction de magistrat », contre des responsables au ministère de la Culture qui avaient exclus cette maison d’édition du dernier Salon du livre d’Alger. Ce même salon a refusé la vente des ouvrages de la célèbre écrivaine Nawal El-Saadaoui.
« Koukou Editions s’est vu interdire, lors du Sila 2022, une douzaine d’ouvrages, jugés, en violation des procédures légales, « contraires aux valeurs nationales ». Signe particulier de certains de ces livres, leurs couvertures sont illustrées par des figures emblématiques de la Révolution algérienne : l’héroïne de la Bataille d’Alger Djamila Bouhired, les chefs historiques du FLN Hocine Aït Ahmed et Mohamed Khider, le grand patriote, officier de l’ALN Abdelhafidh Yaha, le doyen des militants des droits de l’Homme Abdennour Ali-Yahia… », a écrit Arezki Ait Larbi, directeur des Editions.
Ait Larbi a révélé aussi un autre scandale. Il a révélé qu’un éditeur égyptien s’est vu interdire l’exposition d’ouvrages de Nawal Saadaoui, célèbre écrivaine, psychiatre, et figure égyptienne de l’émancipation des femmes arabes. « Aux protestations indignées de cet éditeur, la réponse d’un responsable du ministère de la Culture et des Arts ne laisse aucun doute sur les motifs de l’interdiction : » les Algériens n’aiment pas les féministes, encore moins Nawal Saadaoui » !! On l’aura compris, ils leur préfèrent donc les nazis et les fachos ? ! », a-t-il précisé.
Dans son communiqué, Ait Larbi, qui a révélé la présentation du livre « je n’ai pas dit mon dernier mot », d’Eric Zemmour, leader de l’extrême droite française célèbre pour sa haine des Algériens, au dernier Sila, a expliqué que ses révélations ont acculé la Commission de censure qui a publié, mardi 14 novembre, un communiqué au nom du ministère de la Culture et des Arts, pour « formellement démentir les rumeurs relayées par certaines parties tendancieuses concernant l’autorisation d’exposition d’un livre de l’écrivain français d’extrême droite ».
« Défiant le ridicule sans craindre la contradiction, les censeurs anonymes ont reconnu dans le même texte que les services du Commissariat ont procédé directement, dès la découverte du livre (…) à son retrait immédiat, tout en adressant un avertissement à l’exposant ». estime Ait Larbi, ajoutant qu’on « attendait les explications du ministère de la Culture et des Arts sur une forfaiture qui a choqué les Algériens et éclaboussé l’institution », mais « on a eu droit au plaidoyer de délinquants pris sur le fait, qui tentent de faire diversion par des approximations et des non-dits pour tromper l’opinion publique ».
Estimant que ses Editions ne vont pas se laisser entrainer dans des débats biaisés, Ait Larbi a apporté des clarifications quant à cette affaire. « Tout en confirmant l’intrusion du livre d’Eric Zemmour au Sila, la Commission de censure du ministère de la Culture et des Arts prétend ne pas l’avoir autorisé. Pourtant, la procédure est bien rodée : avant d’arriver sur les stands du Sila, le catalogue des éditeurs-exposants est soumis au contrôle de la Commission de censure, qui prononce l’interdiction de tout livre édité à l’étranger et jugé, à tort ou à raison, indésirable. Quant à la censure éventuelle d’un livre édité en Algérie, elle relève de la compétence exclusive de l’autorité judiciaire (article 54 de la Constitution) », a-t-il écrit.
Il a ajouté que « contrairement à ce que laisse entendre la Commission de censure, le livre d’Eric Zemmour n’a pas été introduit frauduleusement ; il figure bien sur la liste transmise par son éditeur pour laquelle les censeurs anonymes n’ont pas jugé utile d’émettre la moindre réserve, encore moins prononcer une interdiction. N’est-ce pas là une autorisation ? », estimant qu’en « feignant de découvrir le scandale une fois révélé sur la place publique, et en qualifiant ceux qui l’ont dénoncé de « parties tendancieuses », les membres de la Commission de censure ajoutent à l’ignominie la mauvaise foi.
Coupables, au minimum, de laxisme et de manque de vigilance, leur connivence idéologique avec l’extrême droite française est désormais bien établie par un faisceau de preuves ». Il a souligné, par ailleurs, qu’en « se débattant dans de pitoyables élucubrations pour se dédouaner de toute proximité avec Eric Zemmour et l’extrême droite française, les censeurs anonymes ont réussi à occulter un autre scandale qui dure pourtant depuis 2016, et qu’ils ne peuvent prétendre ignorer tant les preuves de leur troublante tolérance sont multiples et accablantes : l’exposition au Sila et la vente libre des œuvres de deux monstres du XXe siècle, « Mein Kampf » d’Adolf Hitler et les « Mémoires » de Mussolini, traduits en arabe par un éditeur égyptien ».